Mangkait, enfin. C'est un tout petit bout de terre. Trop petit pour figurer sur la carte d'Indonésie qui trône sur un mur de ma chambre et fait pourtant près d'un mètre carré. Si je dis qu'il y a au moins 800 mètres entre les deux points les plus éloignés, on va encore me dire que je suis marseillais. Sur ce petit bout de terre vivent 300 familles. Presque toutes de la pêche. A gauche en débarquant, ce sont les catholiques, et à droite les protestantes. Le partage a été fait de la même façon qu'en Papouasie par les missionnaires qui se sont divisés oecuméniquement le travail. Donc cette île est très essentiellement chrétienne. C'est assez rare pour pouvoir être souligné.
L'arrivée sur l'île est... déconcertante. N'ayons pas peur des mots, disons même effrayante. Les gens qui y vivent sont pauvres et coupés du monde. A un point que l'on imagine pas. Tous étaient très excités. Des enfants sont partis en courant ou pleuraient dans les bras de leur maman en voyant ce blanc débarquer. Des adultes me touchaient la peau ou m'arrachaient les poils des jambes, se demandant comment l'on peut être si blanc et si poilu, avoir un nez si long tout en restant pleinement un être humain.
Ça ne leur semblait pas évident du tout. Moi qui ne suis pas tactile pour un sous, j'ai pas trop aimé. En plus de leur attitude, leurs visages aussi m'ont effrayé: Je ne voyais que les dents noires, les chicots, les gencives vides, les haillons qu'ils portent. C'est très déconcertant, et, dans un premier temps met très mal à l'aise. Je ne me sentais pas du tout à ma place. Mon Dieu où suis-je?
Puis Hendrikus m'a invité à déjeuner dans sa famille. Ok, on y va. Sa famille habite une cabane sur pilotis, sur la plage, en face de l'école primaire. Je dis cabane, parce que c'est bien de cela qu'il s'agit: 5m sur 5 environ, un plancher et des murs en planches mal dégrossies, un toit en tôle. Pas un seul meuble, si ce n'est une vieille petite console sur laquelle est posée la télé. On mange par terre, on s'assoie par terre, on dors par terre. Si on peut sur un petit matelas, mais le plus souvent à même le plancher. Pas d'eau courante, pas de salle de bain. La mer fait office de wc et le puits commun de douche. Pas de téléphone, peu d'électricité (en fait, simplement un générateur le soir pour la télé et une ampoule de 20W). On cuisine par terre aussi, avec un réchaud au fuel, ou un petit feu. Toute la famille vit là, grands-parents compris.
Voilà pour les premiers décors, misérables. A côté de cela, la nature est superbe. Là ou ils n'ont pas été explosés, les coraux sont grandioses, la mer est bleue-comme-avec-du-canard-wc, les poissons multicolores, la vue sur les autres petites îles très belle.
Sur l'île elle même, on trouve, en plus des cabanes en bois qui couvrent l'essentiel de la surface, une école primaire, une église et un temple protestant, et un collège tout neuf. Ce sont les seuls bâtiments en dur. On trouve aussi un terrain de foot, deux puits, et c'est tout! C'est rapide. Olivier, le volontaire précédent, m'avait dit que l'on en faisait le tour en 15 minutes. Mais c'est faux. Il faut deux-trois jours! Certes, un français mettrait 15 minutes, en marchant. Un indonésien ne peut pas ne pas s'arrêter dans CHAQUE maison pour discuter. Alors forcément, c'est plus long...
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